Numérique VS papier : un combat historique
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“…. et on assiste à un nouvel uppercut de la part de la filière papier qui s’est largement laissée dominer depuis des années par le numérique sur la scène environnementale. Les a priori que nous portions sur la nécessité de tout dématérialiser sont mis à mal grâce à une riposte d’anthologie de la part de “La Poste”, … ohlala, elle a commandé une étude ACV sur les impacts environnementaux de chacun des partis !”.
L’analyse du cycle de vie (ACV) est un outil d’évaluation multicritère des impacts environnementaux. Elle permet de mesurer les effets quantifiables de produits (ou de services) sur l’environnement. Cet outil prend en compte toutes les étapes du cycle de vie. L’ACV papier/digital permet d’évaluer les outils de communication selon leur impact environnemental.
Round 1 : fight!
L’émergence et le déploiement du numérique ont provoqué un engouement tel, que son impact environnemental n’a été étudié et communiqué qu’une fois que nous en soyons tous devenus totalement accros. Le « tout, tout de suite » est aujourd’hui ancré dans nos façons de communiquer, de produire, de travailler, d’apprendre et de partager. Nous avons donc tout dématérialisé, en pensant bien faire, pour lutter contre la déforestation, notamment.
Comme pour tous les sujets liés à la résilience, il s’agit ici d’affiner nos connaissances pour pouvoir agir en bonne intelligence. On préfère vous prévenir, la conclusion de billet ne sera pas “vive le papier ! le numérique est plus polluant.” Non. On va tenter de décrypter les subtilités des différents scénarios de cette étude, de comprendre les leviers d’optimisation et de complémentarité entre le papier et le numérique identifiés par le cabinet chargé de l’étude, et de NU-AN-CER. C’est bien la tâche la plus difficile dans la communication responsable ! Ce n’est jamais tout blanc ou tout noir (sauf pour ceux qui prennent l’avion pour faire un Paris-Bordeaux en vue d’aller jeter leurs mégots sur la Dune du Pilat. Ça, c’est très mal). L’objectif de cette étude est d’identifier comment faire usage du papier et du numérique en fonction des scénarios, pour rendre plus responsable notre communication.
Round 2 : to fight? or not to fight?
Avant la sortie de cette étude menée par le cabinet Quantis et mandatée par La Poste, la dernière analyse véritablement complète sur le sujet datait de 2010. Elle annonçait une empreinte carbone du papier 63% supérieure à celle du numérique. Ce genre d’étude est cruciale pour nous réapprendre à consommer de façon intelligente et responsable, que ce soit au bureau ou à la maison. En 2021, de nouveaux éléments ont été pris en compte.
Pour réaliser les impacts des différents scénarios, 16 indicateurs ont été retenus, dans 5 grandes familles d’impacts (les écosystèmes, les changements climatiques, la santé humaine, les ressources et l’utilisation de l’eau). Chacun d’eux indique son impact sur l’environnement et la qualité de vie selon le support de communication étudié.
Il y a donc 5 scénarios représentatifs des usages les plus courants dans la relation client.
Scénario 1 : publicité pour une marque automobile
Scénario papier : mailing publicitaire de 8 feuilles en format A5, recto/verso en couleur, envoyé par courrier.
Scénario numérique : email avec photo et texte court + lien vers le site internet vitrine, hébergé sur un serveur moyen français.
L’analyse du premier scénario révèle que l’utilisation papier est plus favorable que le numérique pour 13 indicateurs environnementaux sur 16. Si l’on prend l’indicateur lié à l’appauvrissement de la couche d’ozone, le papier a 1,7 fois moins d’impact que le numérique.
Scénario 2 : catalogue d’une marque de mobilier
Scénario papier : catalogue d’ameublement de 18 feuilles format A4 recto/verso couleur distribué par courrier.
Scénario numérique : e-mail avec photo et texte court + lien vers site web avec e-shop, hébergé sur un serveur moyen français.
A contrario, le second scénario est plus en faveur du numérique. En effet, 14 indicateurs sur 16 indiquent un impact plus élevé de l’utilisation papier. L’étude relève notamment que le papier a 2,5 fois plus d’effets sur le changement climatique que le numérique dans cette situation.
Scénario 3 : prospectus pour une chaîne de restauration
Scénario papier : flyer promotionnel d’une feuille format A5 recto couleur distribué sur zone de chalandise.
Scénario numérique : contenu vidéo consulté sur réseau social hébergé sur un serveur moyen français.
Le troisième scénario remet à l’honneur le papier qui est plus favorable que le numérique pour 15 indicateurs environnementaux sur 16. La papier a notamment 3 fois moins d’effets sur le réchauffement climatique que le numérique.
Scénario 4 : promotion d’une enseigne de distribution
Scénario papier : catalogue promotionnel de 18 feuilles, format 190 x 285, distribué sur zone de chalandise.
Scénario numérique : contenu promotionnel à télécharger après consultation d’une vidéo sur réseau social, hébergé sur un serveur moyen français.
Le papier est également à privilégier sur le quatrième scénario pour 15 indicateurs environnementaux sur 16. L’ACV révèle notamment que le papier a 5 fois moins d’effets sur l’acidification des océans.
Scénario 5 : Facture d’électricité
Scénario papier : facture de 3 feuilles format A4 recto/verso couleur, dans une enveloppe en papier distribuée par la poste, stockée durant 5 ans dans une chemise en papier.
Scénario numérique : facture PDF reçue via plateforme internet, hébergée sur un serveur moyen français, ouverte et lue, imprimée dans 25% des cas, stockée 5 ans.
Enfin, le cinquième scénario est assez partagé sur les indicateurs environnementaux. 9 d’entre eux sont en faveur de l’utilisation papier et les 7 autres pour l’utilisation numérique. Dans ce cas précis, le papier a 2,5 fois moins de ressources fossiles utilisées, mais il a également 5 fois plus d’impacts sur l’utilisation des sols.
Round 3 : with great power, comes great responsability
La Poste propose d’activer plusieurs leviers d’amélioration. Pour le papier, il est suggéré de s’atteler à améliorer le ciblage et l’adressage des campagnes de communication, à travailler la nature du papier (on pense aux labels FSC et Blue Angel) et à adapter le procédé d’impression le plus pertinent (encres, aplats de couleur, pelliculage). Pour le numérique, il faut chercher à optimiser l’hébergement en premier lieu, à réduire le poids des documents à envoyer et limiter les flux de données.
Il est important de bien comprendre que l’on ne fait en aucun cas l’apologie du papier face au numérique. Encore une fois, il faut nuancer. D’ailleurs, l’étude prône la complémentarité des médias, avec une utilisation plus réfléchie, basée sur des chiffres désormais existants. Cliquez pour accéder à l’étude ! (Attention, ceci est un lien PDF, ne le stockez pas dans vos téléchargements pendant 5 ans).
Knockout :
Comme le disait Mohamed Ali, “Qui a la même vision du monde à vingt ans qu’à cinquante, a perdu trente ans de sa vie.”